Largage

Les grues cendrées

Elles ont traversé notre ciel, du Sud vers le Nord, triangle instable d'une proue fendant l'air, puissamment, égrenant leur chant migratoire, leur KROOH portant loin, et annonçant l'arrivée imminente du printemps. 

 

Leur vol m'a rendu ma boussole intérieure. Mes chemins se redessinent avec précision. La joie est revenue.

 

Je suis debout.

Vol de grues cendrées - 1er mars 2015
Vol de grues cendrées - 1er mars 2015

A l'aube de ce mardi matin (J 20 !) les nuages de fièvre et d'angoisse se sont dissipés. Les aiguilles des aphtes sont toujours là mais en sourdine. Elles me laissent déguster mes amandes, mon pain et mon délicieux yaourt de la ferme !

La colline est entrée dans la cuisine : une infusion du thym qui pousse en touffes sur le versant sud et quelques brins du romarin, de celui qui monte la garde près du muret à moitié effondré, là où cavalent les chevreuils, les familles de sangliers et les renardes des matins pâles....

 

Lou aussi est revenu à la vie !

 

A midi, Je revêts mon costume de Carol, et nous mangeons des huîtres !

J'ai appelé le cabinet d'infirmière pour ma petite prise de sang demain matin.

On a toujours l'impression que l'on demande quelque chose d’absolument inédit, là ou dans d'autres bureaux. Les gens tombent des nues. Avant cela me mettait mal à l'aise. Aujourd'hui je trouve cela presque amusant.

 

Hier, au moment d'appeler pour réserver, le Véhicule Sanitaire Léger, ma voiture avec chauffeur quoi, pour jeudi matin, Lou me dit qu'il peut m'accompagner.

"Mais.... Tu vas poireauter toute la journée, comme l'autre fois ! Tu vas t'ennuyer !

- Pas plus que ça. Je serai avec toi. Tu ne seras pas seule."

Je me rends compte soudain que personne n'a jamais été aussi présent pour moi que Lou.

Les larmes me sont montées aux yeux d'un coup. Je voudrais le serrer contre moi, plus fort que je ne le peux. Je pose ma tête au creux de son épaule et nous restons là. Tous les deux. Sans rien dire.

 

Et notre fille va venir aussi, dans quelques jours. Pour mon anniversaire. Il y a 5 ans, à son retour de son année passée au Japon, elle s'est envolée vers Paris, mais dès qu’elle le peut, comme un oiseau, elle migre vers le sud, vers la colline, ses chênes et ses pins, ses prés et ses genévriers, ses matins et ses soirs calmes.

La petite maison, les objets de son enfance et de son adolescence. Tous encore là. Témoins de son passé et de son histoire...

Et puis nous deux.

 

Notre fille a pris son vol. Depuis longtemps déjà.

Mais ne nous a jamais quittés. Ce constat me remplit d'une joie profonde et lumineuse


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