LE CHEMIN DES AIGUILLES

Et vint la pluie

Après tant de matins où je constatais, navrée, qu'aucune amélioration ne se dessinait, j'en avais fini par me résigner à rester impotente et à moitié cassée pendant encore de longues semaines.

Jusqu'à la fin des cures de chimiothérapie et jusqu'à ce que les derniers effets finissent par s'évanouir.

 

Je continuais néanmoins, mais avec lassitude et pas mal d'amertume, à me délivrer tous ces soins interminables qui n'apportaient rien de plus que de me focaliser davantage sur mes bobos, au lieu de m'aider à les oublier.

Je me consolais en espérant seulement que ceux-ci n'allaient pas empirer grâce à toute cette attention que je leur portais.

 

La nuit du 10ème au 11ème jour fut particulièrement "épineuse".

Pourtant, dans la journée, j'avais cru, encore une fois, percevoir quelques signaux optimistes...

Le soir, l'orage se mit à gronder. Il éclata vers les dix heures et demie. Il fut de courte durée et peu violent et je m'endormis peu après.

Mais à 1 heure du matin, Yamanba, pas du tout effrayée par mes grimaces de la veille, revint me tirer par les pieds et par la même occasion de mon sommeil ! Je restais ainsi, encore une fois, à mijoter dans son chaudron jusque vers les cinq heures, un peu avant l'aube. Puis le feu lentement baissa d'intensité.

A l'heure où il convient de se lever, chez les "gens bien", je me suis enfin rendormie. Mais je n'ai jamais été un "gens bien"...

 

Plus tard, je petit déjeunais de pain et de fromage, sans avoir même le courage d'aller me faire cuire un œuf, et les pieds au frais dans leur amie, la bassine bleue.

 

Ensuite, j'ai repris mes badigeonnages successifs à la crème, de cortisone, d'abord, puis à la lanoline... tout en écoutant les terribles nouvelles du Népal où, la veille, un très fort tremblement de terre dévastateur, rendait mes petites souffrances bien relatives....

Népal - Katmandou - Séïsme (Huffington Post)
Népal - Katmandou - Séïsme (Huffington Post)

Après le repas de midi, je chaussais avec les précautions devenues déjà coutumières les fameux "faux Crocs" pour claudiquer un peu autour de la colline.

 

Mais, au bout de quelques mètres seulement, j'eus de nouveau cette curieuse sensation que les bogues de châtaigne piquaient... avec moins de conviction.

Cela ressemblait plus à un fourmillement désordonné. Mais assez furieux néanmoins. 

 

A force de les écraser, de tout mon poids, chaque jour, seraient-elles finalement en train de se flétrir ?

Les aiguilles seraient-elles en train de se ramollir ? Les piquants de se pourrir !?

Je n'ose crier victoire mais Lou a déjà remarqué que mon pas s'est fait plus assuré !

 

Le soir, après une douche, les soins d'usage qu'il me faut lister pour être sûre de ne pas en oublier, je m'allonge pleine d'espérance.

 

Et puis... dans la nuit, la pluie est venue. 

Toute la nuit. Lentement. Froidement. Sans interruption. Sur les fleurs de lilas et les iris.

 

Ce matin, douzième jour de la "cure", l'air est chargé de moiteur. Il exhale des haleines d'herbe tendre et de fleurs écrasées.

Je vais mieux. Je me sens mieux. 

Il fait froid. Il faut remettre les pulls et les gilets de laine.

 

La fatigue me terrasse parfois encore en pleine journée, mes petits misères sont encore là mais elles sont passées un cran en-dessous. Et ça fait bigrement du bien... !

 


Écrire commentaire

Commentaires: 0